7.3.11

Démarches d'écriture - Le projet de recueil (2/2)

Voici la deuxième partie concernant la description du projet de recueil qu'était L'Aquilon. Ici, je m'attarde au recueil et à sa structure.

Le recueil

À l'époque, je travaillais toujours mes recueils de la même façon : je passais au crible un microcosme donné. Mon objectif était de prendre toutes les personnes reliées à une chose et de raconter leur histoire l'une après l’autre. Dans ce sens, mon recueil s’approche beaucoup plus du roman par nouvelle que du recueil ensemble. J’aime l’idée qu’on puisse lire une nouvelle, avec un incipit et une chute, dont le personnage et l’univers de celui-ci prendront des forces grâce à une seconde nouvelle, puis à une troisième, et ainsi de suite. Ma formation en programmation informatique est perceptible dans cette caractéristique de mon écriture : la formation d’hyperliens, d’interliens et de références font de L'Aquilon un genre de page web sans les mots soulignés et phosphorescents.

J’ai choisi la science-fiction sans vraiment y réfléchir. Au moment d'écrire L'Aquilon, mon écriture se résumait à un récit de science-fiction (Le Contrat) et à un recueil de nouvelles réalistes (24 heures) ainsi qu’à quelques contes mythologiques, nouvelles réalistes et de science-fiction. Dans le cas de ce projet, j’ai voulu mettre de la science-fiction dans une histoire qui aurait bien pu se passer en Alaska. Cela m’a permis de mettre en place des objets technologiques modifiés pour les grands froids qui n’existent toujours pas dans les pays nordiques et qui viennent donner plus de profondeur et de texture aux personnages (selon la notion « espace-personnage »).

J’apprécie beaucoup la science-fiction douce ("soft SF") et je crois en écrire pour permettre à ceux qui ne sont pas des fanatiques invétérés de SF pure et dure d’en lire aussi. Mes textes sont très loin de Star Wars ou Star Trek et font réfèrence à un futur proche. Assez, du moins, pour que l’on reconnaisse notre monde et les comportements des personnages qui y évoluent. Christiane Lahaie, amie et enseignante à l'Université de Sherbrooke, m’expliquait à ce sujet que j’écrivais plutôt de la « littérature d’anticipation » car, plutôt que d’axer sur la technologie du futur, je m’inquiétais de la société du futur. J’accepte la dénomination avec plaisir. Le terme lui-même me semble plus accessible.

Au fond, j’écris ce que j’aime lire, tout simplement. En parlant avec Patrick Senécal, je lui ai justement demandé s’il préférait la reconnaissance des pairs à celle du public. Il a commencé par me dire qu’il aimait mieux se faire reconnaître dans un café que de se faire parler en long et en large de son livre par un littérateur. Le plus important, avait-il souligné, c’est d’écrire ce qu’on aime lire. La passion se transfère au papier et le lecteur sentira celle-ci dans ce qu’il lira. C’était voilà huit ans. Je respecte toujours fidèlement cette pensée et la conseille fortement à tous.

La structure

Pour ce qui est de la structure de mon recueil, j’ai enfin respecté la chronologie et j’ai écrit mes textes en sachant que je la respecterais. Avant cela, je m'amusais à inverser l'ordre des événements (comme peuvent en témoigner ceux qui ont lu Le Contrat ou 24 heures). Par le montage en casse-tête, je voulais rendre l’effet du trouble dont les personnages souffraient, mais j’ai bien vite réalisé que mon fameux montage antichronologique ne faisait que troubler la lecture. Afin de garder l’effet, mais de permettre une lecture cohérente, je n’ai simplement pas respecté l’ordre des chambres. Ainsi, je recrée le hasard qu’on associe souvent à la synchronicité.

La structure de mon recueil aurait voulu que je présente uniquement les personnages vivant dans les douze chambres en autant de nouvelles, mais j’en ai ajouté une. Celle-ci est la première du recueil et sert de prologue aux textes à suivre. C’est dans cette nouvelle que le lecteur découvre l’Aquilon ainsi que la petite fille qui reliera les personnages entre eux.

C'est tout pour aujourd'hui. Dans le prochain billet, je situerai L'Aquilon dans ma démarche d'auteur.

Bonne journée,

Carl